10 neuromythes et ou 10 croyances erronées sur le cerveau

10 neuromythes et ou 10 croyances erronées sur le cerveau

Chacun de nous traduit une information entendue à partir de ses connaissances antérieures et en fonction de sa culture. Chacun de nous le reconstruit et l’interprète en fonction de ce que “décode” son cerveau, de manière individuelle et/ou collective. Moins notre cerveau dispose de connaissances, plus il émet des hypothèses aléatoires sur le sens du message entendu. C’est dans une perspective de clarification que Pascale Toscani dans son livre “Comprendre le cerveau de son enfant” fait zoom sur 10 neuromythes pour nous inviter à porter un regard critique, d’une part sur ce que la société considère à tort comme des évidences et, d’autre part, sur les catégories dans lesquelles nous pouvons être amenés à enfermer les enfants, par souci de cohérence.

1- TOUT SE JOUE AVANT 6 ANS

Faux! Rien ne se joue avant 6 ans, mais très certainement, tout se joue avant 100 ans! A 3 mois, le cerveau a atteint la moitié de la taille du cerveau de l’adulte. A 6 ans, son volume est proche du cerveau adulte. Toutefois, rien n’est joué. Il faut presque trois décennies pour que le cerveau soit mature dans son développement et l’aventure ne s’arrête pas là. Il va continuer à se modifier au fil des apprentissages. Nous allons connecter des neurones tout au long de la vie et même en créer de nouveaux. Cependant, ce que l’enfant encode comme information dans son enfance aura de l’influence sur ce qu’il pense de lui-même et de son avenir, ainsi que sur son comportement cognitif. Les enfants ont une capacité illimitée d’apprentissage.

2- L’ENFANT NE SERA PAS STIMULE SI ON NE LUI PROPOSE PAS DES ACTIVITÉS VARIÉES

Faux! Un enfant est naturellement curieux. Son cerveau est programmé pour apprendre, mais il ne le sait pas encore. Depuis sa naissance il ne cesse de découvrir le monde dans lequel il grandit. Il décode de manière non consciente les informations qui sont à sa disposition pour tenter de leur donner du sens. Lorsque, pour la première fois, il utilise le mot “pourquoi”, il prouve qu’il est capable de demander des explications supplémentaires que son cerveau ne peut lui fournir. Il est important de développer chez les enfants l’habitude de questionner: Pour comprendre le monde et pour le mettre en mots qu’il pourra partager avec d’autres. C’est ce que l’on peut considérer comme la vraie stimulation. “Et toi, qu’en penses-tu?” Une question clé! Stimuler son enfant, c’est faire en sorte qu’il ne soit jamais vraiment tout à fait satisfait de notre réponse pour qu’il ait envie de poursuivre ses investigations cognitives. La question est un puissant facteur de motivation! Nul besoin de multiplier des activités extrascolaires pour être stimulé. La stimulation se joue à travers toutes les formes de relations au monde. Des ingrédients favorables? Offrir à l’enfant la possibilité de tisser des liens avec des environnements variés, se confronter à des points de vue différents, le mettre en appétit intellectuel, le rendre curieux, lui faire prendre conscience de son corps, de la marche, le vélo…

3- UN ENFANT NE DOIT JAMAIS S’ENNUYER

Faux! Trop d’activités viennent annihiler le bienfait de la diversité des activités. On passe de quelque sorte de l’arrosage à l’inondation. Lorsque le cerveau est au repos, il se met en “réseau du mode par défaut”. Les enfants ont besoin d’activer ce réseau. Il est important qu’ils “s’ennuient”, qu’ils rêvent de tout et de rien, qu’ils se promènent dans le temps: leur passé, leur présent et leur futur. L’enfant (tout comme l’adulte d’ailleurs), a autant besoin d’être stimulé que d’être confronté à lui-même. C’est une question d’équilibre entre son intérêt pour le monde extérieur et le développement de son intériorité. Il sera important de veiller à limiter le temps passé devant les écrans.

4- IL EXISTE DES PROFILS D’APPRENTISSAGE SPÉCIFIQUES

Faux! Le cerveau se développe en fonction des environnements auxquels il est exposé. d’un cerveau généraliste, l’enfant va petit à petite développer un cerveau expert. Expert de sa langue ou de ses langues, mais aussi expert de sa culture, de son environnement. Apprendre c’est donc connecter des neurones, mais aussi supprimer les connexions possibles. Les enfants naissent avec des prédispositions qu’il ne faut pas transformer en profils d’apprentissage. Poser sur eux les étiquettes de visuel, d’auditif ou de kinesthésique fait courir le risque de les enfermer dans des représentations auxquelles ils se conformeront. Le traitement neurologique d’une information est complexe. Il implique plusieurs fonctions cognitives qui interagissent entre, elles tandis qu’entrent en jeu les émotions, la motivation, la confiance en soi, etc. L’apprentissage est multimodal, il est donc important de mettre la disposition de l’enfant des supports variés qui activent tous les sens: visuels, auditifs, tactiles, olfactifs, gustatifs, mais par dessus tout, des supports qui activent sa curiosité.

5-FAIRE FAIRE DE LA MUSIQUE A SON ENFANT LE RENDRA PLUS INTELLIGENT

Faux! Toute activité, qu’elle soit musicale, sportive, artistique ou cérébrale, surtout si elle perdure dans le temps, créera des réseaux de neurones spécialisés. L’activité musicale, comme toute les activités, va participer à l’évolution et au développement du cerveau. Toutefois aucune preuve scientifique ne vient confirmer qu’elle rendrait un enfant plus intelligent.

6- APPRENDRE UNE DEUXIÈME LANGUE TROP TÔT NUIT A L’APPRENTISSAGE DE LA PREMIÈRE LANGUE

Faux! Le cerveau n’est pas structuré pour n’apprendre qu’une seule langue. A sa naissance, le cerveau du nourrisson est capable de traiter les phonèmes de toutes les langues: c’est son environnement qui le conduira à intégrer les phonèmes et les structures grammaticales de sa langue ou de ses langues, aux dépens des autres langues. Donc, pas d’impact négatif sur sa langue première. Cet apprentissage pourrait même consolider sa langue première et enrichir sa plasticité cérébrale. On a longtemps cru qu’apprendre deux langues à la naissance entraînait des troubles du langage. Il n’en est rien. Plus l’enfant apprend tôt une langue seconde, plus il a de chances d’en conserver les phonèmes en mémoire.

7- LORSQUE LES ÉTAPES D’UN APPRENTISSAGE SONT DÉPASSÉES, LE RETARD NE PEUT PAS SE RATTRAPER.

Faux! Nos systèmes scolaires invitent à faire apprendre la même chose, au même moment, de la même façon. Tout le monde sur la même ligne de départ et tout le monde en même temps sur la ligne d’arrivée. Certes ceci vise à répondre à un besoin fonctionnel (conduire et orienter les apprentissages cognitifs de tous les enfants). Toutefois, aucun cerveau ne suit la même courbe de développement. Apprendre est un processus neurologique qui ne s’arrête jamais. Il n’y a pas de périodes critiques au delà desquelles plus rien ne serait possible. Il y a simplement des fenêtres d’opportunité durant lesquelles l’apprentissage est facilité. Des enfants pour lesquels plus rien ne semblait possible, ou pour lesquels les choses se présentaient de manière bien compromise ont trouvé des ressources pour repartir, pour réussir le reste de leur parcours d’études.

8- TRÈS TÔT, LES ENFANTS SONT DÉTERMINÉS PAR LEUR PERSONNALITÉ

Faux! Penser que les enfants sont déterminés par leur personnalité à la naissance revient à penser que tout est joué et même bien avant 6 ans. Le regard que l’on porte sur un enfant a une influence sur son développement cognitif et psychologique. Les enfants ont besoin de ce regard pour comprendre qui ils sont, pour construire tous les jours leur identité. Mais ils ne peuvent pas discerner ce qui relève de la projection parentale, ou de leur entourage, de ce qui révèle de leur propre personnalité. Que ces projections soient négatives ou positives, elles seront intériorisées de la même manière et auront autant d’influence sur lui. A la question de savoir si l’inné est plus important que l’acquis dans la construction d’une personnalité, une réponse ambiguë: les deux sans doute! L’enfant passe beaucoup de temps à chercher qui il est à travers les différents regards portés sur lui, l’adolescent et l’adulte passent souvent beaucoup de temps à s’en détacher… Cet itinéraire nous permet de savoir qu’il est important d’aider son enfant à comprendre qu’il dispose de toute sa vie pour se découvrir et qu’il ne doit jamais s’enfermer dans les regards qu’on a portés sur lui.

9- IL EXISTE UN CERVEAU FÉMININ ET UN CERVEAU MASCULIN

Faux! Les recherches en cours montrent qu’il y a autant de différences entre un cerveau féminin et un cerveau masculin qu’il y a de différences entre deux cerveaux d’hommes ou deux cerveaux de femmes, surtout si les personnes vivent sous des latitudes différentes et connaissent des conditions de vie qui n’ont rien de comparable. Les cerveaux s’adaptent à l’environnement. Les garçons ne sont pas meilleurs en maths et les filles ne gèrent pas mieux le langage, mais les stéréotypes sur le genre du cerveau provoquent des comportements chez les adultes qui modèlent ceux des enfants.

10- L’UN DES DEUX HÉMISPHÈRES DOMINE L’AUTRE (CERVEAU GAUCHE OU CERVEAU DROIT)

Faux! Nous savons aujourd’hui, à partir des découvertes sur les réseaux de neurones, qu’il n’y a pas de prédominances hémisphériques dans le traitement des informations, ni de personnalité hémisphérique. Les hémisphères reçoivent des informations venant du côté opposé du reste du corps, mais ces informations sont ensuite distribuées dans chacun d’entre eux à travers des chemins neuronaux d’une grande complexité. On utilise le terme d’asymétrie cérébrale pour décrire le fait que les régions du cerveau qui sont impliquées dans le traitement de l’information réalisent des choses différentes selon qu’elles se trouvent dans l’hémisphère droit ou gauche. L’information peut requérir un des hémisphères ou les deux, le cerveau est un modèle de coopération!

En ce début de siècle déjà bien engagé, nous quittons à petits pas l’idée du déterminisme cognitif et de la fixité de l’intelligence pour cheminer vers la plasticité cérébrale et la capacité d’une personne à se transformer tout au long de la vie. Il est donc important d’aider son enfant à comprendre que ce qu’il ne sait pas encore faire dépend davantage du temps et de l’effort qu’il va y consacrer que de sa personnalité ou de son intelligence. La vie est une suite d’expériences qui modifieront l’architecture de son cerveau au fil du temps. Rien n’est jamais joué…

Et pour poursuivre ce voyage, un dernier article…

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